La Chine est-elle menacée d’une crise économique ?

Ce n’est pas un hasard si les sites de nos banques occidentales diffusent des nouvelles rassurantes de la Chine, car elles n’ont évidemment aucun intérêt à ce qu’un séisme économique survienne de ce côté. Mais la Chine, on finirait par l’oublier tant son décollage économique a été spectaculaire, n’en est pas moins restée une dictature, plus encore, un régime totalitaire qui s’est seulement débarrassé du socialisme. Ainsi a-t-elle pu sortir de la pauvreté, mais en conservant le monopole du parti communiste sur la vie aussi bien politique qu’économique, et naturellement sur les consciences, ce qui est le propre des régimes totalitaires.

On finirait par l’oublier, mais cette réalité nous revient brutalement quand on voit comment elle vient de cesser de publier plusieurs centaines de statistiques, ce qui complique la tâche des commentateurs étrangers qui suivaient jusqu’à présent la situation économique du pays.
Nous allons tout de même tenter d’en prendre une photographie, comme pour faire pendant avec la situation américaine. On se souvient qu’en pleine campagne électorale, à la fin de l’année dernière, nous avions rappelé les problèmes structurels, et non pas seulement conjoncturels, que le futur président devrait affronter : inégalités, pauvreté, santé publique, endettement, désindustrialisation, etc., et c’est en fonction de cet état des choses que nous tentons d’expliquer la politique économique sévère adoptée par M. Trump.

Voyons maintenant ce qu’il en est de la Chine. Il est clair que sa croissance est tombée à 3% tout au plus, même si le régime mise sur 5%, un objectif auquel nous ne croyons pas. Nous avions déjà souligné la gravité de la crise immobilière depuis au moins deux ans, en ce qu’elle était lourde de conséquences. La Chine, qui a suivi une politique trop mercantiliste, c’est-à-dire fondant toute sa prospérité sur un commerce extérieur largement nourri de dumping social, est évidemment exposée aux menaces de démondialisation que M. Trump fait peser sur elle.

Aussi devrait-elle, mais elle y pensait déjà avant Trump, réorienter son économie vers l’activité intérieure ; or, quel est cet intérieur ? Les banques qui ont prêté beaucoup d’argent pour la construction immobilière, dont on sait qu’elle a conduit à une bulle – soit 30% du PIB, oui, 30% ! – ont peur d’engager les capitaux qui leur restent. M. Jinping voudrait les réorienter vers la production manufacturière de pointe, mais pour quoi faire, si les États-Unis ferment ou presque leurs frontières ?

Alors, écouler cette production vers le marché intérieur ? Mais la population vieillit, elle préfère accumuler un capital de retraités, elle avait compté sur l’immobilier, et l’on sait la déception qui a suivi. Alors, devant la peur du lendemain, les Chinois réduisent leur consommation, au moment même où le pouvoir attend d’eux qu’ils consomment ce que les Américains ne pourront plus autant consommer.
D’autant qu’avec un taux de chômage des jeunes supérieur à 20%, la consommation n’est pas près de redécoller.

Ainsi, l’économie chinoise est-elle dans l’impasse. Et la politique trumpienne aggrave les choses, puisqu’il n’est plus question que l’Amérique creuse encore ses déficits pour ses beaux yeux. Reste l’Union européenne, qui n’a pas de politique de souveraineté, mais elle aussi est malade.
Donc, on peut craindre une crise économique chinoise durable, malgré ce que peut en dire la communication de nos banques.