Le 8 mai, jour férié, nous commémorons la capitulation de l’Allemagne en 1945. Ce ne fut pas un armistice comme le 11 novembre 1918, et il n’y eut pas même de traité de paix par la suite. En effet, on signe un traité, même cruel comme celui de Versailles, de pays à pays, mais là, les puissances alliées souhaitaient que l’Allemagne disparaisse tout simplement : de fait, pendant quatre ans, jusqu’en 1949, il n’y eut plus d’Etat allemand, seulement des zones d’occupation partagées entre la Russie bolchevique, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. Cette situation était-elle durable ? Non, car s’il pouvait ne plus y avoir d’Etat, l’Allemagne existait toujours, dans son peuple nombreux, sa langue, sa culture millénaire que l’on ne pouvait pas résumer aux douze années tragiques de la parenthèse hitlérienne.
Le 8 mai 1945 : contexte historique
Rappelons pourquoi les principales puissances du monde la combattaient. Après sa victoire inattendue sur la France, Hitler n’eut pas la sagesse d’attendre d’avoir vaincu l’Angleterre réfugiée dans son île : dès le début de l’été 1941, il s’en prit à la Russie, son ancienne alliée. Pire encore, en décembre suivant, pour complaire au Japon qui venait d’attaquer Pearl Harbor le 7 décembre, il déclara lui-même la guerre à l’Amérique, espérant que son geste fou convaincrait l’Empire du soleil-levant d’attaquer également la Russie à revers. Mais en réalité, cette coagulation de plusieurs guerres différentes les unes des autres, que par commodité on appelle la Deuxième guerre mondiale – on n’ose plus dire la seconde aujourd’hui – ne fédérait pas les intérêts : le Japon ne visait que les siens.
Après le suicide d’Hitler dans Berlin assiégée par les Russes, l’Allemagne, acculée de toutes parts, désira faire un tri entre ses ennemis : le 5 mai, elle sollicita une reddition auprès des Britanniques, sans succès. Le 7, à Reims, auprès des Américains, sans succès non plus : c’est que les Alliés de l’ouest avaient promis aux Russes de rester soudés contre leur ennemie commune, et aussi de n’accepter aucun armistice, seulement une capitulation sans condition.
C’est ainsi que cette capitulation fut signée le 8 mai, dans Berlin conquise par les Russes. Il était prévu quatre signatures : l’allemande et celle de ses trois vainqueurs, mais sur un coup d’audace, De Gaulle envoya le général de Lattre, qui, arrivé sur place, demanda que l’on joigne aux trois drapeaux alliés un quatrième, celui de la France qui avait pourtant perdu la guerre cinq ans plus tôt. Et par la suite, la France obtint sa propre zone d’occupation L’Allemagne disparut donc comme Etat, jusqu’à ce qu’en 1949, les occidentaux ne créent à l’ouest une république fédérale. En réponse, la Russie bolchevique créa la République démocratique allemande, et cette division dura jusqu’à la chute du communisme. Ce n’est qu’en 1990 qu’un traité signé à Moscou rendit à l’Allemagne réunifiée son statut d’Etat
comme les autres, sans régime d’occupation.
Entre-temps, des hommes exceptionnels, de part et d’autre du Rhin, auront su entamer un processus de réconciliation : De Gaulle et Adenauer. Puis Giscard invita son collègue Schmidt à des conférences internationales majeures. Le couple Mitterrand-Kohl fut le dernier à avoir le sens de la grande histoire. Aujourd’hui que le couple franco-allemand se délite, la question se pose si cela ne viendrait pas d’une difficulté des vainqueurs à assumer leur propre part de responsabilité dans les deux guerres mondiales : on ne peut se réconcilier que sur une base de vérité, pas de propagande. Mais ceci, comme disait Kipling, est une autre histoire…
Source :
Jour férié de la Victoire des Alliés (8 Mai)