Il arrive que l’on s’interroge sur le fait que nos écoles enseignent des matières de management général, pouvant être, surtout dans les toutes premières années du cycle en cinq ans, de la pure culture générale. A une époque où, depuis notre rive, on assiste au naufrage de l’université qui a heurté un iceberg pour avoir pris la direction contraire, cela peut en effet surprendre. Mais nous ne faisons que répondre à une demande formulée par les entreprises elles-mêmes, où nos étudiants commencent leur carrière. Le monde de l’entreprise, en effet, attend de nous que nous ne nous contentions pas de délivrer des savoir-faire en marketing, ressources humaines, gestion, communication, etc., mais que nous aidions nos étudiants à devenir des cadres, des managers : nous ne sommes pas une école de marqueteurs, de gestionnaires ou autres ; nous le sommes, bien sûr, mais par-delà ces expertises, nous sommes un groupe d’écoles de management.
C’est là qu’interviennent plusieurs enseignements qui ne sont pas à proprement parler techniques, ou spécialisés, mais qui aident nos étudiants à prendre du recul sur le monde qui les entoure, de façon à ce que les phénomènes qui s’y observent soient évalués avec le plus de clairvoyance possible, ce qui les aidera à évaluer avec la même clairvoyance la vie de leur entreprise, et donc à prendre les bonnes décisions.
L’Obsolescence de l’homme, ou « l’homme de masse »
Pour démarrer cette année 2023, je citerai le philosophe allemand Gunther Anders, qui en 1956 publia un livre à bien égards prémonitoire, L’Obsolescence de l’homme. Ayant été un témoin des totalitarismes de son époque, il prévoyait que l’avenir des grands desseins d’aliénation collective ne passerait plus par la violence, mais par un conditionnement fondé sur la limitation de nos aptitudes personnelles à être soi-même. Il s’agira, prédisait-il, de réduire de manière drastique le niveau et la qualité de l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité, sa pensée est bornée à des préoccupations matérielles médiocres qui lui interdisent d’exercer son libre-arbitre. L’information destinée au grand public sera anesthésiée, on diffusera
massivement, via la télévision, des divertissements abrutissants, flattant toujours l’émotionnel, l’instinctif.
On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, avec un bavardage et une musique incessants, d’empêcher l’esprit de s’interroger, penser, réfléchir. On fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de façon à ce que l’euphorie de la publicité, de la consommation, deviennent le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté. La sexualité sera placée au premier rang des intérêts humains comme un puissant anesthésiant social. Anders concluait : « Le conditionnement produira ainsi de lui-même une
telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclu du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions matérielles nécessaires au bonheur ». Il en résulterait une sorte de nouveau produit qu’il appelait « l’homme de masse ».
Replacer l’homme au cœur de l’entreprise
C’est en en lisant cette prévision que nos programmes de management prennent tout leur sens : notre ambition à nous est de replacer l’homme au cœur de l’entreprise, de lui rendre son rôle d’acteur principal, de façon à ce que l’économie soit au service de l’homme, et non pas le contraire.
Bonne année 2023 !
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